7aout 2007,
Il est 17heures. Il a fait beau encore aujourd'hui un
temps légèrement couvert et chaud. Un temps comme on en a parfois au
printemps et qui vous ferait tout plaquer pour partir à la pêche.
Surtout que depuis quelques jours, les imitations de fourmis font bouger
les truites sur le Haut-Salat.
Nous sommes en ariège et plus précisement dans le
Haut-Couserant. Une région très bien irriguée par de nombreuses et
belles rivières de 1ere catégorie: le salat , le garbet, l'arac et tous
leurs affluents. Ici c'est le pays de l'eau. Elle est présente sous
toutes ses formes. C'est aussi le pays des ours, mais cela est une autre
histoire.
Le temps semble ne pas avoir d'emprise sur la vie
d'ici. On est bien dans cette région. Si un jour vous venez par là, vous
verrez encore de braves gens faire les foins à la main dans des
prairies pentues. Vous vous arrêterez peut-être faire un brin de
causette avec les plus anciens qui prennent le frais sur le pas de leur
porte. Allez vers eux. Vous ne le regretterez pas. En tout cas, tout
comme la Lozère et autres endroits de ce genre, j'aime ces régions et
les gens qui les habitent. J'aime ces hautes terres toute proches de
l'Espagne. Ici on trouve le calme et le repos. On peut passer une
journée sans voir âme qui vive, à condition de sortir des sentiers
estivaux.
Revenons si vous le voulez bien à la pêche. Allez, suivez moi ...
Je campe dans un lieu stratégique pour la pêche. L'endroit s'appelle "oust" parfaitement situé au confluent du Salat et du Garbet. Ce soir, je remonte la vallée du Garbet en direction d'Aulus. Comme souvent en montagne, la route suit la rivière pour des raisons géographiques.
Je
connais le coin où je me rends ce soir. Je peux y planquer ma voiture à
l'écart de la route principale. L'accès à la rivière est facile et
comme chaque fois j'ai passé quelques heures à faire du repèrage au
début de mon séjour. Donc tout va bien ... peut-être trop bien !!
Depuis quelques jours, je remonte régulièrement la
rivière avec ma boite de fourmis et jusque là ça m'a plutôt réussi. Donc
ce soir, muni de mon inséparable 8 pieds Pezon et Michel et de ma soie
naturelle parallèle, je m'empresse de descendre vers l'eau quand
soudain, je pensse à ma 10 pieds soie de 3 qui est dans le coffre. Elle
serait plus adaptée au secteur. Donc retour à la voiture pour échange de
canne. Je conserve néanmoins ma soie naturelle si agréable sur ces
cours d'eau de montagne.
La riviere est pavée de gros blocs de granit qu'il
faut souvent escalader pour longer la bordure. Je dois me montrer très
prudent. Mon épaule me fait souffrir. Je suis seul et la nuit tombe très
vite dans ces vallées encaissées. Le soleil quitte la rivière vers
19heures. Et à 21h il fait déja bien sombre. Je ne peux me permettre aucune imprudence.
Je dois me placer en plein courant, à l'aval du plat
que vous voyez sur la photo. Les truites ariégeoises sont farouches.
L'eau est très claire et l'on est vite reperé. Donc pas question de
faire un pas sur le plat. Rien ne bouge. J'observe ... 20h30 3 poissons
se postent et gobent régulièrement sur de minuscules moucherons.
J'attaque le poisson le plus en aval. Mais ma fourmi le laisse
totalement indifférent. Je rallonge ma pointe, je change pour une fourmi
plus petite ... Idem. C'est la cas typique de situation où il faut
mieux analyser que harceler.
Ce poisson est malin et retord. Ses 2 copains
continuent a gôber. Lui s'est un peu calmé. Que faire ? La lumière
baisse, les poissons amont sont trop haut. Si je les essaie, je risque
de couvrir le poisson aval et faire fuire tout ce petit monde. J'aime
bien ces poissons qui forcent notre réflexion. Ils nous font progresser.
Je m'assois. Reprendre le bas de ligne, allonger et affiner la pointe,
ouvrir la boite à mouche qui pends à mon cou et choisir. Bien repèrer
les veines de courant pour éviter le draguage. Comment vais-je me
positionner pour attaquer de nouveau ?{mospagebreak}
Si seulement quelques phryganes pouvaient éclore. Elles me donneraient
la solution à mon problème. Il est peut-être trop tôt pour ça. La
solution, je vais la trouver dans un recoin de ma boite à mouche: un
sedge gris en coq pardo sur hameçon de 24. Il ne m'en reste qu'un. Ce
genre de mouche m'a déjà rendu service par le passé. Alors ayons
confiance. Autre chose le 12/100 en pointe n'est pas adapté et je sors
le grand jeu: 1 mètre de 8/100. Il me reste peu de temps et je mets
toutes les chances de mon côté. Je me planque le long de la rive droite
(à gauche sur la photo).
1er passage: un éclair dans l'eau. Le poisson est
actif. Je mouille ma mouche avec un peu de salive. Elle flotte plus bas.
2è passage: gobage, ferrage. Le poisson est pris mais stupeur mois
aussi. J'ai pêché sous la végétation rivulaire comme avec ma 8 pieds et
mal m'en a pris puisque la soie a fait 2 tours autour de l'extremité
d'une branche. Je me hisse sur un gros rocher. Le poisson tire de son
coté, moi du mien. Je n'ai qu'un bras de valide et il me faut lacher la
canne, ce que je fais à regret. Elle gagne les courants. Mon frein peu
serré ne la retient pas et je la vois qui lentement mais sûrement
s'éloigne de moi.
Alors si je résume:
je suis en équilibre précaire sur un rocher rond!
la nuit ne va plus tarder!
la truite cherche à s'enfuir par tous les moyens!
mon bdl et ma mouche sont d'une finesse extrême!
ma canne est train de descendre la rivière en dévidant la soie du moulinet!
bref ça ne va pas fort!!
il me faudra tout abandonner le temps de descendre du
caillou, tailler une branche en crochet pour rattraper ma soie. J'ai à
ma gauche une truite qui tire tout ce qu'elle peut pour se libérer, à ma
droite 15 mètres plus bas ma canne qui descend en aval et au dessus une
soie qui pend en direct des branches. Puisque la branche tient la soie,
rien n'est perdu. Je capture par miracle la truite qui commence à
fatiguer, en ramenant mon bdl à la main. Ouf!! Viens le tour de la
canne. C'est en attachant ma soie à un galet afin de garder une
sécurité que je peux tout lâcher et descendre vers la canne qui a fini
par se coincer entre les rochers.
Après reprise en main, un ferrage énergique et
libérateur dégagera la ligne du galet qui retourne à son élément. Ouf !!
Je suis claqué et en sueur, je ne prendrai qu'un seul poisson ce
soir-là. Mais dans des conditions pareils, je m'estime heureux d'avoir
fait face à tous ces aléas. Il est grand temps de rentrer car la nuit
est presque tombée. Et le terrain du retour est tout sauf commode.
Bonsoir !!
Gérard